Articles

Affichage des articles du février, 2018

Besofs et mastamatafs

Image
C’est par d’étranges et incompréhensibles formules que le pépé Trutet (pas le pépé forgeron, non, celui de l’autre versant familial) exprimait parfois une espèce de détachement du monde contemporain – enfin je veux dire contemporain de l’époque de mon enfance et adolescence – en accompagnant souvent ses formules d’une légère rotation de la tête, les yeux portant vers le haut et sa moue esquissant une sorte de sourire espiègle à travers sa pipe coincée entre ses dents. Ses mots s’envolaient, aussi difformes que les volutes de fumée de son tabac Caporal Gris qu’il avait engouffré puis tassé quelques minutes auparavant dans ce prolongement buccal terminé par un curieux fourneau qu’était sa vieille pipe culottée. ‘’Les besofs et les mastamatafs, quand on a la lucidité, eh ben voyez vous ...’’. Il donnait souvent une suite par d’autres formules tout aussi étranges énoncées entre ses dents serrées sur son brûle-gueule auquel il mettait le feu par un antique

Faire silence

Image
Faire silence, de temps en temps, c’est comme prendre du recul, c’est comme éloigner les choses de son regard pour mieux les percevoir, mais sans pour autant s’en éloigner soi-même. Lors de mon évolution dans la découverte de la peinture, j’avais expérimenté déjà cette façon de resserrer les paupières jusqu’à ne laisser qu’une fente de perception diffuse de la lumière et de la vision. Il est étonnant de constater comme la perception des lointains ainsi observée, dans l’objectif de peindre un paysage, par exemple, nous aide à mettre en évidence ce qui deviendra leur traduction sur la toile, cet estompage vers le bleu des éloignements, avec tout l’intérêt de la perte de perception des détails qui traduira encore mieux la troisième dimension nécessaire à la profondeur sans laquelle tout semblerait sur le même plan et tomberait dans la platitude de l’excès des détails insignifiants et des éléments tous mis sur un même plan.. Je crois que laisser venir parfoi

Loulou de mer

Image
Et si je me la jouais ‘’vieux loup de mer’’ … ? Déjà du côté des archétypes, il me faudrait – peut-être ? - une bonne vieille barbe, fournie un minimum, de celle qui asseoit une image de virilité suffisamment crédible. Cette gueule de Tabarly par exemple, photographiée en 1976 (ci-dessous, le livre "à Eric") à son arrivée vainqueur de la transat anglaise à Newport à bord de Pen Duick VI est de celles qui m’ont souvent laissé songeur. Rêveur ? Admiratif ! Oh, oui, aussi, de l’exploit, bien sûr, mais surtout face à celle gueule de loup de mer et son regard perdu dans le lointain de son épopée de solitaire vainqueur, avec cette bonne vieille barbouze qui vous pose un vrai vieux loup de mer. Rha la classe ce Tabarloche ! Eric Tabarly dans le livre ‘’à Eric’’ … Hélas, je parviens tout juste à obtenir un semblant de crédibilité sur ce domaine ( le domaine pileux j’entends!) après une période vraiment prolongée et dans une absence très vo

Cabotage

Image
Dans le flamboiement du soir, la lande et la roche viennent se confondre dans le rougeoiement comme si elles retrouvaient toutes les deux l'essence d'une lave originelle qui viendrait s'écrouler dans les flots essoufflés de la mer étale. Puis le flot les prolonge vers l'infini de l'océan, obligeant à porter le regard vers l'horizontalité ultime.  Soir sublime où le soleil démontre son essence divine en imposant à notre évidence ces réunifications des éléments dans sa chaude lumière. L'herbe rase de la lande, les roches de la côte sauvage peuplées de lichens et de multiples et indescriptibles concrétions minérales, végétales ou animales, l'air embaumé d'iode et des effluves des algues en décomposition, les oiseaux marins batifolant sur la grève comme des écoliers en récréation, l'étirement du nuage cotonneux sur l'horizon et qui peine à vouloir y noyer son dieu, tout paraît enfin unifié dans un même élan vers l

La forge

Image
Il est parfois des instants trop rares de lucidité qui nous traversent dans certaines occurrences imprévisibles et qui sont de ceux qui nous ramènent au pied du mur de notre égo. Des moments ou les pensées partent à la dérive. Je ne sais pourquoi dans ces incontrôlables et inattendus voyages mémoriels il m’est arrivé parfois de rejoindre les odeurs sublimes de la forge de mon grand-père maternel.  Ferrures et matériaux y habitaient, chevaux y entraient et en ressortaient, tous métamorphosés par ses coups de marteau sur l'enclume, par ses gestes vigoureux de forgeron remaniant à sa guise ou selon son savoir-faire ancestral – car c’est bien toute une lignée de générations d’ancêtres forgerons qui l’y précédèrent - tout ce qui lui passait sous la main sans que ces éléments, objets ou chevaux y puissent influer en quoi que ce soit sur sa volonté. Mon pépé forgeron, maître du feu et de la matière, dans son antre à l’ineffaçable et sublime odeur pour laqu

Ma première histoire d’amure

Image
C'était ma première grande histoire d'amure, en 2015 quand je suis parti faire le tour de l'Irlande, solitaire. Auparavant, en somme, je n'avais connu que des amurettes. Peut-on considérer que c’est trop court ou bien trop long, trois mois pour une histoire d’amure ? Tout dépend de ce qu’on en retient. Pour ma part, j’en ressors enrichi – mais peut-être n‘est-ce qu’une illusion - de quelque chose d’indéfinissable, Sans doute trop personnel pour en décrire clairement les mécanismes et les imbrications qui en découlent sur la vie ordinaire qu’il faut reprendre, lorsque l’aventure s’est achevée. Une histoire qui n’a pourtant rien d’extraordinaire. Une histoire d’amure, tout simplement. « Ah, l’amure, l’amure ! » Entends-je déjà dans le murmure des pontons. Je pourrais vous en chanter l'histoire, à la façon de notre regretté Jojo qui vient de nous quitter "une chanson d'amuuur...oh yeah !" Oui, on a entendu ça bien des fois, n’est-ce pas ? «

Station des sens

Image
Sur l'autoroute de nos vies masculines, longues et ennuyeuses lignes droites ou tortueux virages et changements de directions, il arrive parfois qu'on dise d'elles qu'elles nous pompent l'air, ou bien qu'elles nous gonflent, surtout quand nous sommes un pneu crevés. Alors nous mettons de temps en temps le clignotant à droite pour faire une pose dans leurs stations des sens.  Il leur suffit alors d'un simple sourire façon «je vous fais aussi le pare brise?»; et nous y voyons tout de suite plus clair. C'est vrai que nous les hommes sommes bien souvent un peu comme de vieilles bagnoles chaotiques. Lorsque nous avons un peu trop tardé à faire la vidange, nous ne sommes jamais très loin du risque de surchauffe. Mais fort heureusement, elles veillent sur nos poussives mécaniques, en grandes connaisseuses de nos ennuis de carburateurs, d'injection et de refroidissement. Nous nous demandons souvent ce à quoi elles aspirent à tord

Ménagez la ménagère

Image
C’est sans doute un fait marquant de l’évolution de la société qui démontre que les barrières du sexisme tombent les unes après les autres. Moins tapageur qu’un hashtag récent et bruyant qui évoque une forme de maltraitance porcine, mais révélateur. Imaginez un peu : La ‘’ménagère de moins de cinquante ans’’ n’est plus. Mais loin de pleurer sur le sort funeste de cette pauvre ménagère, c’est plutôt une heureuse évolution qui a lieu. Car ce concept né dans les années 80 du cerveau des spécialistes de la com’ et de la publicité a vécu. Il paraît qu’on utilise plus cet antique néologisme mais un autre acronyme – autre temps autres moeurs, on aime bien les acronymes désormais. Pour la remplacer, notre ménagère, on a malgré tout frôlé une nouvelle ignominie quand les «sages» des médiamétries et du marketing on trouvé une nouvelle égérie en la personne de la «Femme Responsable principale Des Achats du foyer», également surnommée «FRDA». On nous dit que son

Masculin féminin - le sexe des mots

Image
Les questions de genre et de sexuation fleurissent les débats de temps en temps, et vont même jusqu’à provoquer des oppositions farouches à ce qui serait une « théorie du genre » qui aurait voulu pointer son nez. Plus prosaïquement, ne peut-on pas se poser la simple question du pourquoi de la sexuation des mots et de la spécificité de cette sexuation propre à la langue française, voire aux langues latines ? Car enfin, qui pourra expliquer que les objets table, chaise, fourchette, cuillère, serpillière, éponge, (serviette-éponge, même!) , casserolle, vaisselle, et bien d’autres, sont du genre féminin, quand en revanche les objets couteau, verre, rince-doigt,sont au masculin, tout comme presse-purée, moulin-à-légumes, ce qui semble étonnant ceci-dit pour ces deux derniers qu'on aurait pu croire féminins eu égard à la sexuation des objets du même type cités en premier. Y-aurait-il une spécificité typiquement masculine du presse-purée ou d'un moulin à légumes